Le pouvoir marchand. Corps et corporatisme à Paris sous l’Ancien Régime

Mathieu Marraud

Comment décrire le corporatisme d’Ancien Régime ? Le seul terme de « corporation » est-il approprié ? Ce n’est pas le cas à Paris où les métiers qui exhibent des titres de « corps », de « marchand », montrent leur refus de se ranger derrière de mêmes génériques, de mêmes droits et statuts que les métiers dits « artisans ». C’est toute la nature conflictuelle de l’économie incorporée qui ressurgit avec eux. Métiers, institutions royales et groupes sociaux rivalisent pour incarner le commerce et contrôler des marchandises qui ne sont jamais évaluées par leur seul profit, mais aussi par l’univers social dont elles proviennent ou auquel elles se destinent. Quoique le corporatisme soit alors une liaison forte et locale créée entre le roi, la cité, le privilège, la qualité des biens, la notabilité bourgeoise, il entre en crise, au sein de la société parisienne comme de la monarchie, une fois qu’on l’oblige à se mesurer à des catégories supra-locales. Sa disparition sous la volonté du ministre Turgot en 1776, alors, n’est que la conclusion d’un long processus d’absorption d’acteurs et d’enjeux, situés, dans une administration royale normalisatrice.