L’industrie dans la Grande Guerre

Patrick Fridenson et Pascal Griset (dir.)

Comment la France peut-elle faire face à sa dépendance vis-à-vis de l’étranger pour certains produits, développer l’application des sciences et l’innovation dans l’industrie, mieux articuler ses PME et ses grandes entreprises, dynamiser son secteur public, adapter le marché du travail, rénover les relations public-privé, renforcer sa coopération avec certains États européens et avec les États-Unis ? Ces défis ne datent pas d’aujourd’hui. Ils sont d’abord ceux de la guerre de 1914-1918. Les entreprises, leurs syndicats professionnels, les ouvrières et les ouvriers, les ingénieurs, les militaires et les fonctionnaires les affrontent dans l’urgence. Ils mettent l’État à l’épreuve – entre les différents ministères concernés : la Guerre, l’Armement, le Commerce et l’Industrie, les Travaux publics, le Travail et les Affaires étrangères, entre eux et les Finances, entre les gouvernements successifs et le parlement – car le voici sommé de gagner en agilité et en cohérence, de lutter contre les pénuries et les destructions, de permettre à tous de vivre, d’organiser les approvisionnements, les transports et les fabrications pour le combat, et de conjuguer les positions différentes des territoires. Les défis sont aussi ceux des enjeux de long terme créés par l’occupation d’une partie de la France, les ravages et blocages subis par le reste du pays, l’expérience des changements ordinaires et extraordinaires survenus pendant le conflit armé, l’accroissement du rôle de l’État, les désirs d’Europe face à la montée du pouvoir américain et à l’ébullition à l’Est du continent. Ce livre écrit par des historiens étrangers et français s’inscrit dans la suite des volumes sur les Finances dans la guerre. Il présente le premier panorama d’ensemble de l’industrie française dans cette guerre et des multiples réseaux qui la relient au monde. Il donne à voir le pluralisme du modèle français, sa capacité à gagner mais aussi les coûts de la victoire.

Vincent Debiais

Vincent Debiais est chargé de recherche au CNRS. Docteur en histoire médiévale (Université de Poitiers) en 2004 et habilité à diriger des recherches en histoire de l’art médiéval en 2015, il a travaillé sur l’écriture au Moyen Âge en particulier dans le domaine de l’épigraphie médiévale (Messages de pierre. La lecture des inscriptions dans la communication médiévales, 2009). Ses recherches ont porté ces dernières années sur la rencontre de la culture écrite et de la culture visuelle au Moyen Âge, principalement dans le domaine monumental et celui des objets (La croisée des signes. L’écriture et l’image médiévale 800-1200, 2017). Ses travaux en cours interrogent la représentation du silence dans les images médiévales, entre théologie et iconographie, et la notion d’abstraction dans les pratiques artistiques du long Moyen Âge. Il est affecté au CRH au groupe AhLOMA au 1er mars et nous lui souhaitons la bienvenue

Ce que font les artistes à l’histoire

10 mars – Journée d’étude – Fonds Ricoeur, Paris

Après Nietzsche, la conscience historique a été ressentie comme une « fièvre », une entrave à la compréhension profonde de l’expérience humaine, à son appropriation présente. Paul Valéry, Virginia Woolf, Italo Svevo, partageaient le sentiment exprimé par Stephen Dedalus dans l’Ulysse : l’histoire est un cauchemar à oublier. En revanche, aujourd’hui, de nombreux romanciers et artistes se proposent comme les véritables médiateurs du passé. Ils le « cherchent », et certains d’entre eux visent à combler les failles de l’histoire, d’autant plus que les sujets historiques traités sont imprégnés de questions métahistoriques, comme l’expérience du temps, les temporalités régressives et asynchrones. Le rapprochement est encore plus poussé lorsque les artistes se plongent dans les archives, ou entreprennent des opérations de « re-enactment », comme pour prouver le caractère ouvert et non définitif du passé, ou encore lorsque les frontières entre le documentaire et la fiction s’avèrent plus poreuses que jamais. Les historiens, de leur côté, ont remis en discussion le « noble rêve de l’objectivité » et leurs dispositifs de représentance, et sont devenus plus sensibles à la question de l’imagination-pour-le réel du passé.
Bref le grand partage entre un passé plastique, ouvert à tous les ordres du temps, et un passé révolu et définitif, se retrouve plein de brèches. Pour autant, ces passages ne relèvent pas d’une résolution dialectique des anciens conflits, ni d’une coexistence irénique. Il y a toujours un risque d’esthétisation de l’histoire au détriment des faits. Il y a aussi l’ambivalence de la fiction, lorsqu’elle prétend faire parler les disparus. A travers la diversité des œuvres et des cas qu’il s’agira de traiter, cette journée d’étude, portée par Sabina Loriga (GEHM) et Olivier Abel (Faculté de théologie protestante de Montpellier), avec le soutien du Fonds Ricœur et de la revue Passés/Futurs, cherchera à décrire et comprendre plusieurs configurations possibles des usages de l’histoire par les artistes, depuis la Deuxième Guerre mondiale jusqu’à aujourd’hui, époque où l’art contemporain semble à nouveau imprégné d’une certaine « urgence de l’histoire ».

Luis Miguel Ribeiro de Oliveira Duarte (Universidade do Porto)

9, 12 mars et 15 avril – Conférence – EHESS, Paris

Luis Miguel Duarte, professeur à l’université de Porto est l’un des meilleurs spécialistes portugais d’histoire médiévale, qu’il étudie dans une perspective européenne, en conjuguant approche politique, essentielle dans un pays où la construction de l’état monarchique tient une place centrale, et histoire économique. Il travaille sur des questions d’histoire du commerce et des textiles, où le Portugal joue un rôle original autant qu’important dans la régulation des échanges entre Europe du Nord et du Nord-Ouest (iles britanniques en particulier) et monde méditerranéen, chrétien ou musulman. Invité à l’EHESS par Mathieu Arnoux (GAM), L. M. Ribeiro Oliveira de Duarte collabore avec lui sur des thèmes d’histoire économique autour des comptabilités toscanes du fonds Salviati de l’École normale de Pise, dont plusieurs séries encore peu exploitées, éclairent la place de Lisbonne et le rôle des marchands portugais dans le commerce toscan.

Les enjeux du prophétisme médiéval

23 mars – Rencontre – EHESS, Paris

Cette rencontre autour de Gian Luca Potestà est organisée dans le cadre du projet ERC BIFLOW (Bilingualism in Florentine and Tuscan Works, ca. 1260 – ca. 1416), en présence de l’auteur, avec la participation d’Alain Boureau, Michele Lodone, Antonio Montefusco et Sylvain Piron.
La parution de la traduction française du dernier livre de Gian Luca Potestà, Le dernier messie. Prophétie et souveraineté au Moyen Âge (Belles-Lettres, 2018), issu de conférences que l’auteur avait prononcées à l’occasion d’une invitation à l’EHESS, fournit une bonne occasion d’engager une discussion collective sur le prophétisme médiéval, en le considérant dans toutes ses dimensions : ses ressorts théologiques, ses usages politiques, les formes littéraires de sa diffusion, en latin et en vernaculaire. Sur tous ces aspects, nous évoquerons l’ampleur du travail mené par Gian Luca Potestà et dans son sillage, les chantiers ouverts et les nouvelles perspectives de recherche.

 

 

Décroissance urbaine et enjeu local

Date limité de dépôt : 15 mars – Colloque – Caen

Dans l’imaginaire collectif, ville, urbanisation et croissance urbaine font partie d’un même tout. Or, le contexte de mondialisation soumet les villes à de nouvelles dynamiques socio-économiques, politiques et environnementales parfois antagonistes : métropolisation,  désindustrialisation, changement climatique, etc., le tout dans un contexte de profonds changements démographiques.
Entre 1990 et 2000, un quart des villes de plus de 100 000 habitants des pays du nord et un dixième de celles des pays du sud étaient en décroissance. L’Europe est particulièrement impactée ; entre 1990 et 2010, presque 50% des villes ont connu des pertes de population plus ou moins durables et 20% ont vu leur population diminuer sur toute la période. Les villes peuvent perdre leur rôle de pôles attractifs de croissance. De plus, la crise économique de 2008 a encore accentué ces dynamiques régressives et les disparités existantes. Si ce processus est mondial, il possède également une dimension profondément ancrée dans la sphère locale. S’ensuit ainsi un réel défi pour le développement local des villes. Cette session, organisée par Beatriz Fernandez Agueda (Universidad politécnica de Madrid), Sarah Dubeaux (ENS Paris), Emmanuèle Cunningham-Sabot (ENS Paris) et Marie-Vic Ozouf-Marignier (EHESS), vise à examiner la prise en compte de ces profondes mutations urbaines par les politiques publiques. De plus, nous souhaitons faire du local à la fois l’observatoire et l’objet du questionnement sur la décroissance urbaine. Plusieurs axes de réflexion sont proposés sur : les réponses proposées par les politiques publiques et l’aménagement, les effets locaux de la décroissance urbaine et les impacts des réformes territoriales récentes en France sur les villes en décroissance.

Pouvoirs et environnement. Entre confiance et défiance XVIe-XXIe siècle

Laurent Coumel, Raphaël Morera, Alexis Vrignon (dir.)

Les questions environnementales cristallisent des enjeux de pouvoirs comme le montrent les controverses actuelles autour du changement climatique, de la pollution de l’air, de la mise en péril de la biodiversité et de la transition énergétique. Depuis une quarantaine d’années, elles suscitent des mobilisations et font l’objet de négociations et d’oppositions à toutes les échelles. Or cette tendance récente s’ancre dans un passé plus lointain. Fruit d’un colloque qui s’est tenu à l’université Rennes 2 en octobre 2014, ce livre a l’ambition de montrer l’ancienneté et la richesse des liens entre pouvoirs institutionnels et environnement. Les quatorze contributions réunies ici interrogent les modalités de cette relation en balayant plusieurs siècles d’histoire sur trois continents (Europe, Amérique, Afrique). D’abord, les questions environnementales participent de l’affirmation des pouvoirs : les catastrophes naturelles et le surgissement des risques apparaissent comme des moments privilégiés de cette coconstruction. Ensuite, la définition de l’environnement constitue un attribut essentiel des institutions et des acteurs qui, pour défendre des milieux, sont parfois amenés à les politiser. À travers les aménagements et la gestion des conflits, l’environnement apparaît en n en tant que sujet de négociations et objet de jeux d’acteurs complexes au sein desquels les pouvoirs publics jouent un rôle souvent difficile, à l’interface entre des intérêts divergents.

Labor on the Fringes of Empire Voice, Exit and the Law

Alessandro Stanziani

Après les abolitions de l’esclavage dans l’Océan indien et en Afrique, les mondes du travail demeurent fondés sur la violence, l’exploitation et les inégalités. Une fine ligne d’ombre sépare la liberté de la contrainte. En contraste avec le paradigme atlantique et en s’appuyant sur de nombreuses et riches archives judiciaires, des plantations, des institutions coloniales, cet ouvrage étudie les relations de travail en Inde, dans l’Océan indien et en Afrique- en particulier en Assam, au Mascareignes et au Congo français. L’auteur identifie des ressemblances étonnantes entre les mouvements abolitionnistes en Afrique et en Inde et les pratiques du travail en Europe, en invitant ainsi les lecteurs à penser en des termes de connexions trans-océaniques plutôt qu’en de simples oppositions. Surtout, Stanziani montre la distance mais aussi la proximité et les influences mutuelles entre les notions et pratiques de la liberté dans les mondes coloniaux et en Europe. A partir de cette perspective multi-centrées des dynamiques impériales, Labor on the Finges of Empire est un travail pionnier dans l’histoire globale du travail au XIXe siècle.

Commerce de la soie grège entre la France et la Chine pendant le 19e siècle : impulsions, intermédiaires et influences industrielles de l’échange euro-asiatique au cours de la globalisation

Chao Zhao

Thèse dirigée par Alessandro Stanziani, soutenue le 12 février, devant un jury composé de Chuan-Hui Mau (Université nationale Tsing Hua, Chine), Xavier Paulès (EHESS), Paul-André Rosental (Sciences Po de Paris) et Pierre Vernus (Université Lumière Lyon 2)

Rosa Tamborrino (Politecnico di Turino)

15, 21 et 29 mars et 17 mai – Conférences – EHESS, Paris

Invitée à l’EHESS par Maurizio Gribaudi, Rosa Tamborrino est professeure à l’École polytechnique de Turin (Italie) au sein du département d’architecture et de design. Spécialiste de l’histoire architecturale et urbaine, ses recherches se focalisent sur les implications culturelles de la relation entre art et culture. Elle s’intéresse en particulier à l’architecture haussmannienne comprise dans une large perspective.