24 février – Les Rencontres du GEHM – Paris, EHESS
Souvent renvoyé du côté d’un évolutionnisme plus ou moins implicite et parfois accusé d’entretenir la domination néocoloniale, le champ des études sur la modernité et les processus de modernisation a été progressivement discrédité dans les sciences sociales ces quarante dernières années. Depuis quelque temps, un certain nombre d’historiens et de sociologues ont cependant entrepris de le réinvestir sur de nouvelles bases. C’est à la démarche qui les réunit et aux renouvellements méthodologiques qu’ils proposent que ce dossier de Politix est consacré.
Comme les coordinateurs du numéro , Pablo Blitstein et Cyril Lemieux (LIER-FYT), l’exposent dans leur article introductif, les travaux qu’il s’agit ici de considérer puisent dans des méthodologies et des sources d’inspiration théoriques diverses. En outre, ils étudient des contextes sociohistoriques très différents en les appréhendant à des échelles variables. Au-delà de cette grande diversité, ils ont toutefois en commun d’entretenir une même distance à l’égard de ce qu’on peut appeler le paradigme évolutionniste/misérabiliste, consistant à mesurer les « retards » et les « manques » des groupes humains et des sociétés selon les standards, réputés les plus élevés, de la modernité euro-américaine. De surcroît, ces travaux partagent également une forte insatisfaction à l’égard du paradigme opposé, que l’on peut nommer exceptionnaliste/populiste, consistant à affirmer l’autonomie culturelle des « peuples » non-occidentaux vis-à-vis de l’ « Occident », jusqu’à considérer parfois que la modernité serait une idée ne représentant rien dans la culture « authentique » des autres peuples et qu’elle ne correspondrait pas, en outre, à ce que ces autres peuples attendent réellement.