Histoire des sexualités

Sylvie Steinberg, Christine Bard, Sandra Boehringer, Gabrielle Houbre et Didier Lett (dir.)

Accessible et riche, inventive sur le plan de la recherche documentaire comme dans la réflexion, cette histoire des sexualités propose de retracer les grandes étapes et les évolutions des normes et des mentalités. « Fait social total », la sexualité est à l’intersection de plusieurs types d’approches historiques : sociales, anthropologiques, culturelles, linguistiques. Sous les projecteurs croisés de la démographie historique, de l’anthropologie culturelle et de l’histoire sociale, son histoire pose l’hypothèse que les comportements humains qui lui sont liés – fantasmes et représentations, pratiques érotiques et procréatives – sont eux aussi des objets qu’il s’agit d’étudier sans les détacher des autres pans de l’histoire humaine. Mais on ne saurait aujourd’hui s’intéresser à la sexualité sans y faire également entrer des outils forgés dans le champ de l’histoire du genre. Plus que jamais, la sexualité est devenue un domaine incontournable de l’histoire.

Les Règles de la parenté, entre histoire et anthropologie. Autour des travaux de Gérard Delille

Sous la direction d’Elie HADDAD

Sept historiennes et historiens confrontent leurs objets et leurs méthodes à l’interprétation générale du système de parenté européen médiéval et moderne proposée par G. Delille pour mieux mettre en avant les différents enjeux historiques, théoriques et documentaires des débats en cours dans ce champ de recherche. Le lecteur est ainsi invité à arpenter quelques terrains sur lesquels se déploient des questionnaires visant à mieux comprendre les changements des sociétés d’Europe et d’ailleurs, au croisement de l’anthropologie et de l’histoire.

Un moment des histoires

Jacques Revel
Postface de Christophe Prochasson

Un moment historiographique : depuis un demi-siècle, l’histoire s’est profondément renouvelée dans les questions qu’elle pose et dans celles qu’on lui pose, dans ses propositions comme dans ses pratiques. D’autres histoires ont été possibles. Un demi-siècle, c’est très peu dans le cours d’une très ancienne discipline. Ce n’est pas tout à fait rien dans une vie d’historien. Cinq entretiens radiophoniques proposés par Emmanuel Laurentin dans le cadre de l’émission À Voix Nue en 2017 donnent à Jacques Revel, directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales, codirecteur des Annales, l’occasion de revenir sur les enjeux d’une expérience collective, dont il présente ici une lecture personnelle.

La singularité / Singularity

Samuel Hayat, Judith Lyon-Caen et Federico Tarragoni (dir)
Tracés. revue de sciences humaines, 34/2018, Editions de l’ENS

Ce numéro construit la notion de singularité, entre les sciences sociales, la philosophie et les arts, en prenant un double point d’appui. Le premier est celui des opérations analytiques consistant à produire un savoir généralisant et ouvert à la comparaison à partir d’objets réputés singuliers, uniques, irréductibles, contingents. Tout en s’inscrivant dans la continuité des débats fondateurs en sciences sociales sur l’articulation de la représentativité et du « cas limite », les différents articles du dossier les prolongent sur des bases nouvelles, en s’inspirant des savoirs de la philosophie, du droit ou des arts. Le deuxième point d’appui, plus empirique, est celui des processus concrets de singularisation des individus, à partir de pratiques, d’interactions et de sociabilités dans des domaines divers (représentation politique, engagement militant et usages du droit, pratiques artistiques et culturelles, pratiques d’esthétisation du corps, sociabilités de voisinage). Il s’agit ici d’analyser, cas par cas, les logiques de construction d’identités singulières chez les individus, et de comprendre comment elles interagissent avec les déterminations sociales.

Sergi Sancho Fibla

La thèse de doctorat de Sergi Sancho Fibla était consacrée aux pratiques méditatives et de dévotion de Marguerite d’Oingt, chartreuse du XIVe siècle. Docteur en Études Médiévales par l’Université Pompeu Fabra de Barcelone (2015) grâce à une bourse FI-DGR de l’AGAUR, il a ensuite obtenu un contrat postdoctoral Labexmed à l’Université d’Aix-Marseille (Laboratoire TELEMMe). Ses travaux portent sur la spiritualité médiévale et les pratiques culturelles des communautés de femmes religieuses du XIIIe au XVe siècles  (la literacy, l’exercice de l’écriture et la lecture, les pratiques de dévotion, etc.).
Son projet actuel vise concrètement à approfondir les connaissances des différentes formes d’activités performatives (théâtrales, paraliturgiques) des religieuses dans le Sud de la France et le Nord de la péninsule ibérique entre le XIIIe et le XVe siècles. À partir d’une approche comparée de textes de spiritualité et les sources de la pratique, il s’agit de mieux connaître les activités performatives et son rôle dans la vie rituelle et culturelle des religieuses. Il rejoint le groupe AHLoMA.

Gérard Jorland

Nous avons la tristesse de vous annoncer le décès de Gérard Jorland, survenu le 22 août 2018, à l’âge de 71 ans.
Directeur de recherches au CNRS, directeur d’études cumulant à l’EHESS, Gérard Jorland était entré au Centre de Recherches Historiques en 1982, où il a construit toute sa carrière, continuant d’animer son séminaire après son départ à la retraite. C’était un collègue apprécié et très actif à la fois au sein du laboratoire et au sein de l’école. Comme historien et philosophe, il a œuvré pour ouvrir l’histoire des sciences aux phénomènes sociaux, portant son regard sur la place de la science dans les sociétés et sur l’histoire des problèmes scientifiques de longue durée. Le laboratoire perd un collègue de grand talent, profondément attaché à notre institution.

Thibaut Julian

Agrégé de Lettres modernes et diplômé de l’ENS, Thibaut Julian a
enseigné à Sorbonne Université (contrat doctoral) puis à l’université de
Valenciennes (ATER). Sa thèse, effectuée sous la direction de Pierre
Frantz, étudiait les représentations de l’histoire de France au théâtre
entre 1765 et 1806. Ses travaux portent principalement sur le théâtre,
l’histoire et l’esthétique au « tournant des Lumières ». Il s’intéresse
à la réception de la littérature, aux détournements fictionnels de
l’histoire, ainsi qu’à l’incidence de la politique sur l’évolution des
genres, des formes, des représentations et la constitution du patrimoine
culturel. Son projet postdoctoral s’oriente plus particulièrement vers
les interactions entre les formes théâtrales et les imaginaires de la
Révolution à la Restauration, l’étude des émotions et les modalités de
gestion des traumatismes par la fiction, les spectacles et les arts.

Le travail de l’histoire

Étienne Anheim

Ce petit livre, issu d’un mémoire d’habilitation, part d’une expérience individuelle pour réfléchir à la réalité concrète du métier d’historien, aujourd’hui, dans son quotidien. Il ne s’agit donc ni d’un traité d’historiographie, ni d’une « ego-histoire », mais d’un témoignage professionnel, destiné à la discussion collective. L’ouvrage est organisé en dix chapitres, qui énumèrent des formes de la pratique historienne, y compris dans ses dimensions les plus matérielles : apprendre, lire et écrire, enseigner, évaluer et être évalué, administrer, projeter, éditer, voyager, intervenir, chercher. Ce parcours est l’occasion de s’interroger sur les rapports entre l’épistémologie historique, l’éthique professionnelle et la politique institutionnelle, mais aussi sur la manière dont l’histoire affecte celles et ceux qui la pratiquent.

Michel de Certeau et la littérature

Jean-Christophe Abramovici et Christian Jouhaud (dir.)
L’Atelier du CRH, 19 bis, 2018, revue électronique

Les vingt communications issues du colloque « Michel de Certeau et la littérature » publiées dans ce volume apportent des réponses à ces questions. Elles le font en visant trois objectifs : dresser un état des lieux du littéraire certalien ; décrire et comprendre pourquoi et comment Certeau historien a constamment envisagé l’historiographie la plus rigoureuse comme « fiction » et comme « littérature » ; saisir comment la problématique des actes de lecture débouche sur une éthique et une politique de la présence et de l’absence. Elles le font aussi en tentant de prendre la mesure des potentialités théoriques du recours à la littérature chez Certeau qui a écrit que « la littérature est le discours théorique des procès historiques » et que le roman « c’est le rapport que la théorie entretient avec l’apparition événementielle de ses limites ».

La légende de Yosef della Reina, activiste messianique

Jean Baumgarten

Jean Baumgarten présente ici trois versions de la célèbre légende kabbalistique de Yosef della Reina, étudiée naguère par Gershom Scholem et Zalman Shazar. La première, en hébreu, date du XVIIe siècle, la deuxième fut rédigée en yiddish au XVIIIe, et la dernière est l’un des premiers poèmes composés en yiddish par le jeune Shmuel Yosef Agnon, alors âgé de 15 ans, bien avant donc qu’il ne devienne Prix Nobel de littérature. Cette légende raconte l’histoire d’un anti-héros qui voulut accélérer la venue du Messie par des moyens magiques et des techniques mystiques. Son histoire se termine dans un fiasco tragique, par sa chute et sa disparition. Ce personnage mythique a nourri l’imaginaire religieux des juifs à toutes les époques depuis l’Espagne médiévale d’avant l’Expulsion de 1492 jusqu’à l’époque contemporaine. L’ouvrage présente trois versions de cette légende : La première a été rédigée en hébreu par Salomon Navarro au XVIIe siècle. Après l’échec de l’aventure de Shabbatai Tsevi, un juif d’Amsterdam, Leyb Oyzer, rédigea, au début du XVIIIe siècle, une nouvelle version en yiddish pour condamner les errements du « pseudo-messie ». Le prix Nobel de littérature, Shmuel Yosef Agnon, rédigea un poème sur l’aventure tragique de ce héros. L’historien de la mystique juive, Gershom Scholem, et Zalman Shazar, futur président de l’Etat d’Israël, furent parmi les premiers à étudier cette histoire qu’ils considéraient comme un des grands mythes de la littérature juive.