L’historien et les fantômes Lectures (autour) de l’œuvre d’Alain Boureau

Béatrice Delaurenti, Blaise Dufal, Piroska Nagy (dir)

L’œuvre d’Alain Boureau, multiple et dense, se déploie sur les quarante dernières années en abordant de nombreux domaines de l’histoire du Moyen Âge et du christianisme latin. Elle suit les pérégrinations personnelles et professionnelles d’un chercheur à travers un monde peuplé de silhouettes incertaines : figures de l’hagiographie, faux-semblants de l’État moderne, anges, démons, cadavres et somnambules, vagues individus scolastiques qui eux-mêmes parlent de créatures étranges. Autant de fantômes d’un passé persistant qu’il a suivis avec ténacité tout au long de sa carrière, et qui nous embarquent à leur tour à travers l’histoire.
Ce volume entend garder la trace vivante des deux journées qui furent organisées à Paris en mai 2015 autour de l’œuvre d’Alain Boureau. Ce Liber amicorum d’un genre un peu particulier, production scolastique en quelque sorte, donne à voir les membres d’un studium, ce qu’était le séminaire d’Alain Boureau : les amis, les collègues, les proches, celles et ceux qui l’ont accompagné au cours de ses années passées à l’EHESS. Les textes rassemblés rendent compte de trajectoires et de réalisations, ils en montrent les apports scientifiques et les enjeux intellectuels. Ils racontent, aussi. Ainsi se manifeste la richesse d’une œuvre singulière, construite aux croisements de différentes pratiques des sciences sociales dans une démarche souvent collective, toujours originale et novatrice.

Lettres de Marinette 1914-1915

Béatrice Delaurenti

Comment attendre quelqu’un sans lui parler, sans connaître ses occupations, sans même savoir si on le reverra ? Que trouve-t-on encore à dire lorsque l’on écrit deux fois par jour à la même personne ? La correspondance de Marinette livre un point de vue de femme en période de guerre. Elle a un versant social : la laitière au travail, les départs et les retours des soldats, l’exaltation qui magnifie les combats, la logistique des colis. Et un versant intime : l’attente du facteur, les souhaits d’une vie de couple, la présence utile de la famille. Elle forme une collection exceptionnelle de 253 cartes postales de guerre, aux illustrations tantôt politiques, tantôt romantiques. C’est un parcours dans cette correspondance, ici intégralement publiée, que propose Béatrice Delaurenti.

Transiciones en la agricultura y la sociedad rural. Los desafíos globales de la historia rural. II Congreso Internacional

Appel à communication – Date limite de dépôt : 30 septembre 2017 – Universidade de Santiago de Compostela, Saint-Jacques de Compostelle

Le 16e Congrès de la Société espagnole d’histoire agraire (SEHA) et le 2e Congrès International Les transitions dans l’agriculture et dans la société rurale. Les défis globaux de l’histoire rurale, de juin 2018, qui se réuniront à Saint-Jacques de Compostelle (Galice, Espagne), ont réservé une session spéciale (Session 113) – organisée par Jorge Gelman (Université de Buenos Aires, CONICET), Angelo Alves Carrara (Université Fédérale de Juiz de Fora), Alejandro Tortolero Villaseñor (Université autonome métropolitaine de Iztapalapa) et Pablo Luna (CRH) – afin de rendre hommage à Juan Carlos Garavaglia, décédé cette année.
Ce sera une session qui portera sur l’histoire rurale et des campagnes de l’Amérique ibérique (et latine). Les communications proposées pourront aborder toutes les problématiques de l’histoire des campagnes, par pays ou par régions du continent latino-américain. Les approches comparatistes et de moyen et de long terme seront particulièrement appréciées.

Hommage d’Arlette Farge à Pierre Laborie

Evoquer Pierre Laborie qui vient de nous quitter et avec lequel j’ai eu la chance de diriger un séminaire commun à l’EHESS « Construction et réception de l’événement (XVIIIe-XXe siècles) pendant sept ans (1996-2003), c’est tout d’abord exprimer une vive émotion et une grande tristesse.
Il n’y avait rien de commun entre le siècle des Lumières et le régime de Vichy, pourtant nous nous sommes réunis (sur une idée de Nicole Loraux) avec l’intense conviction, qu’apprendre, c’est apprendre autrement. Avec Pierre Laborie, nous partagions semaine après semaine des regards croisés sur des interrogations communes, et des questionnements sur la manière d’étudier le passé. Pierre Laborie, homme si sensible, cherchait alors à bousculer les idées reçues, ce confort intellectuel des vulgates multiples qui l’entouraient alors, notamment à propos du « politiquement mémoriel » faisant croire que la France sous l’Occupation aurait été toute entière plus ou moins d’accord avec la collaboration. Ainsi avons-nous travaillé sur la mémoire, le tranchant de l’événement, le sens du silence, les pensées multiples et tant d’autres choses.
Mais on ne peut parler de ce séminaire sans évoquer l’ambiance qui y régna : les étudiants y étaient fort nombreux et passionnés. Devenus « grands » aujourd’hui, ils m’en parlent encore, se disant marqués par cette aventure intellectuelle, étonnante, innovante, bousculant tous les stéréotypes et les idées reçues. Je veux aussi parler de Pierre Laborie : son intense sensibilité, son exigence profonde, son sens de la nuance, son désir de vérité ne l’empêchaient pas de pourfendre les évidences, et de trouver, dans les interstices des événements les plus ordinaires, des sens nouveaux et éclairants. Il faisait cela avec humour, tendresse, et aussi une grande conviction. Transmettre aux plus jeunes était sa plus grande joie, et le séminaire ressemblait parfois à un tourbillon de questionnements aidants à penser le réel, à se loger dans l’infinie complexité des comportements. Dns cet heureux travail  de déconstruction, le séminaire tout entier était partageur et très aimé. Un de ses étudiants qu’il avait formé (alors qu’il n’avait pas le bac) aimait à dire : « Il nous conduit vers notre propre intelligence. Il travaille avec notre imaginaire et y confronte son savoir. Avec humour souvent car il était taquin ».De lui, avec lui, j’ai énormément appris, autant sur le plan humain qu’intellectuel et ce travail en commun m’emmena sur des chemins nouveaux. Je les lui dois. Je n’oublie pas qu’il fut l’objet de contestations et d’oppositions. J’ai su les blessures qu’il ressentit de n’être pas toujours compris. Cela n’abîmait jamais son enthousiasme pour transmettre et écrire. Notre grande amitié prit place dans ce contexte unique. De Pierre Laborie, je ne veux rien oublier, tant il fut un exemple et un être d’affection.

GRIHL Dialogue entre Français et Japonais autour de l’usage de la littérature

Yasushi Noro (dir.)

Ce livre, en japonais, de plus de 400 pages, qui vient de paraître en japonais, fait le point sur plusieurs années de travail en collaboration entre le Grihl et des collègues japonais qui ont souhaité accueillir et discuter les problématiques et réflexions théoriques développées au sein du groupe de recherche du CRH. Sous le titre Grihl. Dialogue entre Français et Japonais autour de l’usage de la littérature, l’ouvrage propose une réflexion croisée autour de quatre séries d’objets : les usages historiens de la littérature, littérature et témoignage, l’histoire du livre et l’histoire par le livre, les pouvoirs littéraires des « représentations de la vie ». Contextualisation, référentialité, symbolisation, expérience, énonciation sont autant de notions discutées et éprouvées sur des études de cas, de chapitre en chapitre. A chaque fois, le dialogue est engagé entre des membres du Grihl et les chercheurs japonais appartenant à différentes universités : Université d’Okayama (Yasushi Noro), Université de Kobe (Hiroyuki Nakahata), Université du Kensaï (Hiroaki Shimanaka), Université de Kyoto (Atsuo Morimoto), deux universités de Tokyo : Shirayuri (Keiko Tsujikawa) et Rikkyo (Shojiro Kuwase).

Agir au futur Attitudes d’attente et actions expectatives

Albert Schirrmeister (dir.), Les Dossiers du Grihl, 2017-01

De quelle manière le futur fait-il partie de la réalité historique ? L’attente représente une possibilité majeure de présence du futur ; elle peut être comprise comme une réflexion sur l’avenir qui est toujours liée au passé sous la forme de l’expérience. Dans ce dossier, nous avons choisi d’analyser des actions expectatives : des actes d’attente. Les deux colloques à l’origine de ce dossier ont été organisés autour de deux sujets – la temporalité et la guerre comme événement complexe – liés par le choix d’un type d’action : l’écriture. Les contributions sont des études de cas qui ne sont pas regardées comme représentatives du régime d’historicité de la France des XVIe et XVIIe siècles. Elles aident à mieux appréhender les conditions qui permettent d’agir, entre expérience et attente, et à saisir la multi-temporalité de toute action écrite.

 

La gauche va-t-elle disparaître ?

André Burguière

L’identité de la gauche, son avenir ou sa fin annoncée font l’objet de pronostics politiques et médiatiques. Ce livre clair et documenté offre une indispensable réflexion sur le sujet.
C’est d’abord en historien qu’André Burguière analyse les fondements de la gauche, mais aussi en intellectuel engagé dans la cité. Son objectif n’est pas d’en départager les différentes tendances, mais de dégager leur socle commun. Il montre que le partage idéologique, hérité directement de la Révolution française et indirectement d’une longue histoire de la démocratie, continue à structurer nos représentations politiques. Mais il constate combien la « passion noble » de l’égalité a cédé du terrain. Sur le long cours, l’évolution du système représentatif, le pouvoir des élus et leur professionnalisation ont disqualifié la parole des citoyens. Étatisme, constitution monarchique, faiblesse du syndicalisme, les maux, nombreux, se sont accumulés. Sans compter, récemment, la façon dont le gouvernement socialiste a cédé aux pressions du libéralisme économique et des politiques sécuritaires. Inquiet, mais non résigné, André Burguière jalonne ses analyses de propositions. Rendre la société plus juste, plus protectrice et plus démocratique, tel est, rappelle-t-il, le véritable projet de la gauche.

Athènes à soi-meme étrangère. Naissance d’une capitale néoclassique

Yannis Tsiomis

La création d’un État moderne pose, entre autres questions majeures, celles de la fondation de sa capitale, de l’architecture de la ville, de ses formes et de ses usages, mais aussi celles du territoire national, de la transformation de l’espace public, de sa gestion. Une telle fondation implique aussi la mise en place de dispositifs tout à fait inédits : nouveaux règlements et nouvelles lois, nouveaux métiers et nouveaux acteurs, soit autant de ruptures par rapport à la situation antérieure. À ces égards, la fondation d’Athènes, en 1833, comme ville-capitale de l’État néohellénique constitue un cas exemplaire. La Grèce, sous la tutelle des Bavarois, dut alors se construire en État « moderne », et, pour cela, rompre avec le monde ottoman « oriental ». Cette mission incombera à des ingénieurs et des architectes français et allemands qui furent chargés d’œuvrer en Grèce et d’inventer Athènes et son plan, confrontant ainsi les acquis de leur formation effectuée à Paris, Munich et Berlin aux archétypes architecturaux de la Grèce antique : à travers les parcours de ces nouveaux professionnels, c’est, déjà, la mobilité européenne qui apparaît. Ce livre abondamment illustré, né du dépouillement d’archives, de documents inédits ou revisités (tel le premier plan de la capitale), explore le rapport entre cette « affaire artistique européenne » que fut, selon l’architecte allemand Leo von Klenze, la naissance d’Athènes, et l’enjeu politique, idéologique que constitua la Grèce du début du XIXe siècle pour l’Europe. On y perçoit combien l’usage de l’Antiquité à Athènes revêtit le visage de Janus : argument historiciste assurant une continuité à la fois fallacieuse et nécessaire, mais aussi vraie légitimation de la modernité.

Hygiène publique et construction de l’Etat grec, 1833-1845. La police sanitaire et l’ordre public de la santé

Athanasios Barlagiannis

Thèse dirigée par Patrice Bourdelais, soutenue le 5 mai, devant un jury composé d’Anastassios Anastassiadis (Ecole Française d’Athènes),  Anne Hardy (London School), Konstantinos Kostis (Université d’Athènes), Christelle Rabier (EHESS) et Anne Rasmussen (Université de Strasbourg)