Benoît Grévin
Ce livre s’attaque à un monument de l’histoire française, la loi de 1374 qui fixa dans un latin aussi majestueux que complexe la majorité des rois de France à quatorze ans, pour envisager à travers une étude de micro-histoire textuelle un problème rarement abordé. Au-delà des implications juridiques de la création d’une grande loi dans la France des premiers Valois, comment construisait-on linguistiquement, rhétoriquement, conceptuellement un tel texte ? L’étude philologique de cette loi, connue pour son style surchargé, évoquant le gothique flamboyant, apporte une moisson de découvertes. Derrière les quelques citations bibliques, classiques et de droit romain connues par la recherche depuis les travaux du XVIIIe siècle, se cache un extraordinaire ensemble de renvois au droit canon, à la patristique, à la philosophie aristotélicienne. Ce dévoilement prouve que les techniciens du droit et les philosophes assemblés derrière Charles V avaient voulu, directement guidés par les travaux de Nicole Oresme, faire de cette loi le réceptacle de tous les savoirs accumulés à la cour du « roi sage ». L’exploration de cet envers « rhétorique » du droit incite à poser à nouveaux frais la question des rapports entre la culture médiévale et ses applications juridiques et politiques.