8 mars – Journée d’étude – Institut des études avancées, Paris
De l’Antiquité à nos jours, les discours européens sur les pratiques de la retraite comme lieu de réflexion et de production religieuse, intellectuelle et artistique forment un ensemble complexe de représentations. La retraite implique en effet des formes variées : halte, attente, méditation, contemplation, pèlerinage, prière, isolement, ou même maladie. Qu’elle prenne la forme d’un désert, d’un jardin, d’une forteresse, d’un couvent, d’une cellule, d’un ermitage, d’une chambre de malade ou d’une chambre de travail, d’une métropole même, la configuration réelle et imaginaire de la retraite est soumise à une constante métamorphose qui en fait aussi bien un environnement qu’un alter ego de la personne en retrait du monde. Dans la zone de tension entre passivité et abandon d’un côté, et activité, affirmation et subversion du statu quo social, de l’autre, la relation entre individu et société y est continuellement renégociée. La retraite peut tout autant signifier l’adaptation aux normes que le refus de l’autorité, ou que l’expérimentation de modèles de vie innovants.
Les organisatrices de la journée, Xenia von Tippelskirch (U. Humboldt), Audrey Lasserre (U. Louvain-la-Neuve) et le Groupe Histoire du genre-CRH, voudraient ouvrir la réflexion autour du phénomène de l’isolement (volontaire et productif) dans une perspective de genre. Dans le cadre des études de genre, les questions de la retraite et de l’isolement ont rarement été considérées, bien qu’il semble évident que le renoncement au monde et l’isolement social mettent en question les représentations de genre (sexes et sexualités).
Il s’agira d’analyser les implications éthiques, sociales, politiques, religieuses, discursives, esthétiques, métaphoriques, topographiques, etc., dans une perspective diachronique et synchronique. Quels discours, objets d’art et théories de la retraite deviennent pertinent·es dans une perspective de genre ? De quelle manière des modèles religieux (orthodoxes ou bien dissidents) reprennent et transforment des formes post-séculaires de la retraite tout en modifiant aussi les discours qui s’y réfèrent ? Quelles ruptures, contradictions et transgressions deviennent observables dans la longue durée ? Quelles conceptions de la productivité et de l’engagement sont proposées ? Quand peut-on observer un recul transgressif par rapport aux traditions de retraite historiques ?