Une femme a passé. Méditation sur la Gradiva

Christian Jouhaud

Ce livre traite de Freud lecteur de romans. En regardant Gradiva de ce point de vue, on découvre qu’elle n’est peut-être pas celle que l’on croyait : « fragment » du discours amoureux de Barthes, « charme » chez Pontalis, modèle de peintre et maîtresse d’Eugène Delacroix au Maroc chez Alain Robbe-Grillet, escort girl de la théorie du rêve et Jeanne d’Arc de la jeune psychanalyse.
Freud réussit à transmettre le trouble poétique de l’histoire un peu niaise inventée par Wilhelm Jensen, tout en estompant – c’est un comble – la part la plus érotique du récit. Il n’en reste pas moins qu’au bout de l’enquête sur le lecteur ordinaire de fiction qu’est aussi Freud, l’énigme de sa présence au temps demeure : image intime et insaisissable – « la passante de toujours, celle des ruines là-bas et celle de Paris, celle du trouble et de l’émotion incomprise », celle des Fleurs du mal.